9 octobre 2012

Une comédie charmante mais sans relief.


Elle s’appelle Ruby (Ruby Sparks), de Jonathan Dayton et Valerie Faris (2012).

            Sans doute se souvient-on encore du précédent et premier film réalisé par le tandem Faris-Dayton, Little Miss Sunshine. C’était une comédie très enlevée, avec des personnages bien dessinés, un heureux enchaînement de situations originales, un humour plutôt délicat et, pour finir, une mise en scène assez passe-partout. Bref, le type même du film de scénariste où les réalisateurs assurent tant bien que mal sans chercher midi à quatorze heures.  Après un silence de six ans, Faris et Dayton remettent le couvert, cette fois sur un scénario de Zoe Kazan (la fille de Nicholas et la petite-fille d’Elia) mais d’une qualité nettement inférieure à celui de Michael Arndt pour Little Miss Sunshine.

            Ruby n’existe pas, bien qu’une pétillante jeune comédienne l’incarne avec bonheur  --  Zoe Kazan elle-même, plus convaincante comme actrice que comme scénariste. Elle n’est que le fruit de l’imagination d’un jeune romancier en panne d’écriture, Calvin (Paul Dano), sorte de grand Duduche allénien. Il y a d’ailleurs quelque chose d’un Manhattan version côte ouest dans le portrait de cet écrivain, héritier de l’Isaac Davis imaginé en 1979 par Woody Allen, alors au faîte de son talent  --  un personnage qui était une « île à soi-même » et à qui l’on conseillait d’«avoir un peu foi en autrui». Calvin lui ressemble comme un fils. Incapable semble-t-il de s’intéresser aux autres, il rêve d’une femme idéale qui finit par prendre vie et à mener sous le nom de Ruby une existence autonome mais que Calvin, moderne Pygmalion, peut modeler à sa convenance. Il lui suffit de s’installer devant sa machine à écrire et de rédiger quelques phrases succinctes pour la plier à tous ses caprices.

            C’était une excellente idée d’adapter le mythe de Pygmalion à la culture nord-américaine où un psychanalyste (Elliott Gould, excellent) tient lieu de dieu de l’Olympe. Reste cependant qu’une bonne idée ne suffit pas pour faire un bon film, c’est bien connu, et que Zoe Kazan peine quelque peu à développer son sujet, même si elle parvient ponctuellement à réussir quelques bonnes scènes. Cette irrégularité dans l’écriture, que le peu d’épaisseur des personnages et le manque de brio des dialogues accentuent encore, nuit forcément à l’attention du spectateur, et l’on se surprend ici ou là à se laisser gagner par un léger ennui.

            Non qu’il s’agisse cependant d’un film indigne. Mais la richesse du sujet autorisait des développements autrement plus intéressants. D’autant que les acteurs sont bons et jouent avec une très réelle conviction  --  même si Annette Bening et Antonio Banderas en font un peu trop dans leurs rôles de vieux hippies anachroniques. Mais là encore, ils pâtissent de la faiblesse d’un scénario qui les réduit à l’état de clichés, et c’est dommage. Autre vieux briscard, Elliott Gould s’en sort beaucoup mieux, bénéficiant, lui, de scènes bien écrites et qui sonnent justes  --  peut-être les meilleures, un peu noyées parmi tant de platitudes et de redites. Tout le film ressemble finalement à sa dernière scène, charmante mais conventionnelle et sans surprise  --  autant dire sans le moindre relief.

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